Combler les lacunes de One Health : Perspectives du projet BCOMING

Lors d'une récente discussion avec Alex Smajgl et John Ward de MERFI, partenaires du projet BCOMING, nous avons exploré les complexités de l'approche participative et intégrée des risques zoonotiques. Leur rôle consiste à favoriser le dialogue entre les scientifiques et un large éventail de parties prenantes. Ce dialogue implique non seulement de partager les résultats scientifiques, mais aussi d'écouter les préoccupations des communautés et de les intégrer dans une compréhension plus large de la transmission des maladies zoonotiques. 

Combler les lacunes de One Health : Perspectives du projet BCOMING

L'essentiel du travail de MERFI consiste à maintenir un échange continu entre la science et la communauté. Il s'engage avec les acteurs locaux dans des régions comme le Cambodge, la Guinée et la Guadeloupe, où des risques zoonotiques spécifiques sont à craindre. Au cours de ces interactions, les membres de la communauté mettent souvent l'accent sur les facteurs qui comptent le plus pour eux, à savoir les indicateurs socio-économiques plutôt que les indicateurs purement scientifiques ou biophysiques. Ces échanges révèlent des lacunes dans les données scientifiques qui peuvent être surprenantes, voire difficiles à combler pour les chercheurs. 

Par exemple, alors que des recherches importantes ont été menées sur les espèces hôtes, c'est-à-dire les animaux qui transmettent directement les maladies à l'homme, il y a un manque notable de données sur les « espèces-relais », qui jouent un rôle dans la chaîne de transmission mais ne sont pas les hôtes principaux. Ces lacunes, notamment en ce qui concerne les aspects socio-économiques et comportementaux, tels que la façon dont les gens chassent, cuisinent et vendent certains animaux, sont cruciales pour comprendre les risques de maladie, mais restent sous-explorées.

En réfléchissant à ces lacunes, Alex et John suggèrent que la communauté scientifique a tendance à se concentrer sur des questions étroites et spécifiques plutôt que de prendre du recul pour considérer le contexte dans son ensemble. Par exemple, alors que nous comprenons parfaitement comment certaines maladies comme Ebola ou le SRAS-CoV sont transmises par des espèces hôtes spécifiques, nous manquons de données complètes sur la manière dont ces virus se déplacent à travers différentes voies dans le monde réel.

Prendre du recul, comme l'a dit Alex, implique de redéfinir les priorités des efforts scientifiques pour inclure des perspectives multidisciplinaires qui relient les risques zoonotiques, le comportement humain et les facteurs socio-économiques. Cette approche s'inscrit dans le cadre de l'initiative « One Health », qui reconnaît l'interconnexion de la santé humaine, animale et environnementale. Toutefois, il reste nécessaire de disposer d'équipes plus polyvalentes et de renforcer la collaboration entre les disciplines, y compris en ce qui concerne les rôles non traditionnels au-delà de la science pure.

Un défi récurrent est de maintenir l'attention sur les risques zoonotiques, qui fluctue souvent en fonction des épidémies récentes ou des menaces perçues. Par exemple, lors d'un récent atelier en Guadeloupe, la dengue a été discutée sans grande urgence par les acteurs locaux. Cependant, peu de temps après, une épidémie de virus du Nil occidental a fait basculer l'attention de manière spectaculaire, démontrant ainsi que la perception des risques peut évoluer rapidement.

Pour garantir une attention soutenue aux risques zoonotiques, Alex a souligné l'importance d'institutionnaliser les mécanismes de réponse. L'objectif ne devrait pas être de mettre en œuvre des politiques visant uniquement à réduire ces risques, mais de créer des politiques qui offrent d'autres avantages tout en réduisant les risques zoonotiques en tant qu' « effet secondaire ». Cette approche garantit que les mesures de gestion des risques restent efficaces, même si l'intérêt du public pour des menaces spécifiques diminue.

Les réflexions d'Alex et de John reflètent la nécessité d'une approche plus holistique et intégrée de la gestion des risques zoonotiques. Le cadre « Une seule santé », de par sa conception, préconise la prise en compte du contexte environnemental et socio-économique plus large dans lequel les maladies émergent. Cependant, pour mettre en œuvre cette approche de manière efficace, il faut s'éloigner des cloisonnements disciplinaires et adopter des perspectives transversales.

Des projets comme BCOMING sont à l'avant-garde de ce changement, soulignant l'importance de comprendre les priorités de la communauté, de combler les lacunes en matière de données et de maintenir un programme scientifique flexible et inclusif. L'objectif ultime n'est pas seulement de résoudre des problèmes spécifiques, mais de créer un système plus résilient et plus adaptable pour gérer les risques zoonotiques dans divers contextes.

En conclusion, l'idée d'Alex de faire de la réduction des risques zoonotiques un effet secondaire bénéfique, plutôt que l'objectif principal, offre une voie à suivre convaincante. En intégrant ces mesures à des avantages socio-économiques plus larges, nous pouvons institutionnaliser des stratégies de gestion des risques plus durables et plus efficaces.

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Lors d'une récente discussion avec Alex Smajgl et John Ward de MERFI, partenaires du projet BCOMING, nous avons exploré les complexités de l'approche participative et intégrée des risques zoonotiques. Leur rôle consiste à favoriser le dialogue entre les scientifiques et un large éventail de parties prenantes. Ce dialogue implique non seulement de partager les résultats scientifiques, mais aussi d'écouter les préoccupations des communautés et de les intégrer dans une compréhension plus large de la transmission des maladies zoonotiques. 

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Dans le cadre de BCOMING, l'iDE (International Development Enterprises) travaille d'arrache-pied à l'examen des facteurs de risque socio-économiques qui favorisent la transmission des zoonoses, en particulier dans les hauts lieux de la biodiversité, notamment le Cambodge, la Guinée, la Côte d'Ivoire et la Guadeloupe. Comme l'explique l'iDE, ces travaux se concentrent sur la manière dont les activités humaines - telles que la chasse, le commerce et la consommation d'animaux sauvages - créent des voies de passage pour les agents pathogènes des animaux vers les humains, un processus connu sous le nom de « spillover » (débordement).

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